Philippe Bourdeau : Tourisme de montagne : lost in transition?
Confronté à de multiples injonctions de changement face aux crises climatiques et énergétiques et aux évolutions des modes de vie et des pratiques récréatives, le tourisme de montagne est sommé de s’adapter, voire de se « réinventer ». A l’échelle des territoires, des filières et des métiers, des processus de transition et de transformation – au degré de soutenabilité très variable- sont d’ores et déjà actifs de façon fragmentaire et interstitielle. Ceci en même temps que des inerties et (més)adaptations semblent primer dans une logique de reproduction ou de simple aggiornamento du modèle de développement dominant.
Cette dualité porteuse de contradictions et d’antagonismes peut être en partie décrite comme un dilemme entre des dynamiques d’accélération et de ralentissement, qui s’illustrent par dans des registres culturels, idéologiques, économiques et technologiques.
Philippe Bourdeau est enseignant-chercheur à l’Université Grenoble-Alpes et membre de l’UMR PACTE. Il est responsable du Master 2 « Tourisme innovation transition ». Ses recherches partagées avec Jean Corneloup et Pascal Mao portent sur les territoires, pratiques et métiers liés au tourisme et aux sports de montagne, à partir d’approches de géographie culturelle et critique.
Jean Corneloup : Transition récréative et écologie corporelle
Le monde n’en finit pas de changer et d’être engagé dans une course perpétuelle à l’innovation et à la création de nouveaux produits, services et aménagements. À côté de cette accélération perpétuelle des univers économiques, culturels ou technologiques, d’autres acteurs s’engagent pour limiter les excès de vitesse, ralentir la course au toujours plus et envisager des transitions énergétiques, alimentaires ou politiques pour lutter contre la surchauffe de nos sociétés entropiques. Dans cette ambivalence portée par les uns et les autres, le corps n’échappe pas à ces interrogations et ces mouvements : certains acteurs souhaitent augmenter la performativité des corporéités dans différentes scènes sociales, ludiques, sportives et professionnelles, pendant que d’autres s’engagent dans la voie d’une écologie corporelle douce à la recherche de relations plus respectueuses des éco-bio-systèmes concernés. Si le transhumanisme et la cyborg-culture ouvrent des perspectives intéressantes et stimulantes – et controversées – pour amplifier nos rapports au mouvement, à la motricité, à la santé biologique et au sensible, d’autres orientations souhaitent interroger la notion de transition récréative en lien avec l’écologie corporelle en mutation.
Jean Corneloup est chercheur à l’UMR PACTE et responsable du master CEDESRI (Conception, développement et animation des espaces récréatifs innovants) à l’UFR STAPS de Clermont-Ferrand. Il dirige la revue Nature & Récréation et co-anime avec Philippe Bourdeau une recherche sur les pratiques alternatives et transitionnelles dans les espaces de nature. Liens scientifiques : https://www.pacte-grenoble.fr/membres/jean-corneloup