Sandra Poncet soutient sa thèse

Les troubles musculosquelettiques (TMS) représentent une préoccupation majeure de santé liée principalement au travail. Les aides-soignantes en établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) sont particulièrement touchées. Dans une approche développementale de la prévention des risques, l’enjeu n’est pas seulement de réduire les contraintes mais également de développer les ressources pour concevoir un milieu de travail qui soutient et favorise les régulations. Ainsi, cette thèse porte sur l’activité des aides-soignantes dans les EHPAD à travers deux types de marge·s de manœuvre, dans une perspective de prévention des TMS : les marges de manœuvre (MM) offertes comme conditions antécédentes à l’activité et la marge de manœuvre situationnelle (MMSit) comme champ de régulation de l’activité. Cette thèse soutient que les MM offertes par le milieu de travail, et leur mobilisation dans les situations de travail grâce aux compétences des aides-soignantes, permettent l’élaboration d’une MMSit limitant l’exposition aux facteurs de risque de TMS. En comprenant ces relations entre MM offertes et MMSit, l’intervention en ergonomie peut viser la création de nouvelles marge·s de manœuvre. La méthodologie combine une approche mixte pour caractériser les MM offertes aux aides-soignantes, une étude de cas pour identifier les liens entre MM offertes, MMSit et TMS et une évaluation des effets d’un dispositif participatif basé sur la simulation d’une toilette difficile, sur les deux types de marge·s de manœuvre. Les résultats montrent que les MM sont offertes par l’organisation, le collectif de travail et le résident. Dans l’activité de soin, l’aide-soignante élabore sa MMSit autour de ces MM offertes et de ses compétences. Plus le résident offre de MM en coopérant lors de la toilette, plus l’aide-soignante est en mesure de développer une MMSit suffisante, c’est à dire qui lui permet de préserver sa santé et d’offrir un soin de qualité. Toutefois, la mobilisation de ces MM est possible si elle les perçoit et/ou est en capacité de les mettre en œuvre, en lien notamment avec sa connaissance du résident et son expérience de soin. La présence d’autres MM est également nécessaire comme l’autonomie, le temps, le matériel adapté, les possibilités de travail collectif et de collectif de travail. Les échanges sur le travail au sein du collectif de travail (pairs et encadrement) et le développement réitéré de la MMSit lors des soins favorisent le développement de stratégies de prise en charge efficiente et conduit à la création de MM offertes par le résident. Un dispositif de formation basée sur la simulation d’une opération de toilette difficile s’appuie sur ce processus de développement des MM offertes et de la MMSit par les échanges et dans l’action. Sa mise en œuvre contribue à formaliser et construire des MM favorables à l’élaboration future de la MMSit. Des aides-soignantes rapportent également une transformation de leur pratique impliquant un développement de leur MMSit dans certaines situations. Ainsi, intervenir en prévention des TMS en explorant la dynamique de construction entre MM offertes et MMSit semble un modèle opérant et ouvre des perspectives d’intervention et de recherche à visée développementale.