Compter et rendre visibles les exilé·es mort·es en tentant de traverser les frontières alpines : avancées et défis du projet « DisFrontAlp »

Comme le soulignent les auteur·es de l’ouvrage La mort aux frontières de l’Europe : retrouver, identifier, commémorer (Kobelinsky and Le Courant 2017), il n’y a aucun « dispositif officiel standard » de recensement des exilé·es mort·es aux frontières européennes. La documentation sur les mort·es aux frontières est ainsi « éparse et incomplète » (Blanchard et al., 2008). Ceci est valable pour les frontières extérieures de l’Union européenne comme pour celles dites « intérieures ». Une infographie recensant les « mort·es aux frontières alpines » a été publiée dans le cadre d’une enquête (2022) conduite par deux chercheuses de Pacte, Cristina Del Biaggio et Sarah Bachellerie, et dirigée par l’association Border Forensics pour reconstituer les événements qui ont mené à la mort de Blessing Matthew, exilée d’origine nigériane, dans le Briançonnais en 2018. Or, les recherches menées pour constituer cette base de données ont montré que les informations ne sont ni systématiquement collectées ni systématiquement saisies par les différent·es acteur·es dans les différentes zones alpines touchées par ce problème. Il n’y a aucun échange de données entre ces acteur·es ni de plateforme unique permettant d’en systématiser la récolte, ce qui conduit à un manque d’interopérabilité entre les différentes bases de données. Un projet de recherche financé par le Labex ITTEM et associant trois chercheur·es de différents laboratoires grenoblois (Cristina Del Biaggio, Pacte ; Mikaël Chambru, Gresec ; Karine Basset, Larhra) a notamment comme objectif de mettre en lien ces acteur·es en vue de la publication d’une base de données partagées. Conscient·es des défis méthodologiques et éthiques de cette nouvelle étape de la recherche, l’équipe de chercheur·es du projet DisFrontAlp aimerait partager avec un public sensible aux méthodes quantitatives les avancées et difficultés de ce projet.