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Soutenance thèse / Régulations
Le 16 octobre 2025
Paris

Parler en famille : enquête sur les socialisations langagières enfantines
Cette thèse porte sur les socialisations langagières enfantines en train de se faire, et plus précisément sur la manière dont se construisent, au sein des familles, des dispositions langagières socialement situées. À partir d’une ethnographie des manières ordinaires de parler en famille, elle montre par l’analyse d’injonctions, négociations, participation guidée, questions, et récits comment les pratiques langagières entre parents et enfants, mais aussi entre frères et sœurs, façonnent des manières d’être, de faire et de penser et les inégalités qui en découlent.
La thèse se divise en six chapitres. La méthodologie de l’enquête, qui repose sur une ethnographie des familles est détaillée dans le premier chapitre. L’enquête longitudinale menée pendant deux ans auprès de six enfants issus de familles socialement contrastées s’appuie sur une observation participante répétée et enregistrée au sein des foyers, complétée d’observations à l’école et d’entretiens avec les parents et les enseignantes. Une analyse quantitative des données de la cohorte ELFE (Enquête Longitudinale Française depuis l’Enfance) vient armer cette ethnographie par les statistiques.
Le chapitre 2 distingue trois « manières de parler » distinctes : parler pour parler dans les classes supérieures, parler pour faire dans les classes moyennes et les fractions dotées en capital culturel des classes populaires, parler pour ordonner dans les classes populaires. Si les parents, et en particulier les mères, occupent une place centrale dans les trois types de socialisations langagières, les manières enfantines de parler dépendent avant tout de la nature de la frontière langagière symbolique qu’ils établissent entre les mondes adulte et enfantin. Dans le chapitre 3, l’analyse poursuit la caractérisation des trois modèles de socialisation langagière en s’intéressant aux types de récits circulant au sein des familles (récits pédagogiques, relationnels et positionnels), par lesquels s’incorporent des manières enfantines distinctes de parler de soi. Le chapitre 4 vient ensuite éclairer toute l’importance des frères et sœurs dans la socialisation langagière précoce. Ces socialisations adelphiques sont imbriquées aux socialisations parentales, dans la mesure où les parents délèguent aux aînés une partie de leur pouvoir socialisateur. Ces derniers prennent les rênes et s’exercent à l’autorité sur leurs cadets en recourant à des pratiques langagières socialement situées.
Le chapitre 5 se penche sur des espaces dans lesquelles les frères et sœurs communiquent hors du regard parental, dans le cadre de leurs jeux de faire-semblant. Ces jeux sont des instances de socialisation où les enfants mettent non seulement en pratique des dispositions langagières incorporées au fil des interactions avec les parents, mais en construisent également de nouvelles. Ils sont traversés de rapports de pouvoir liés au rang, à l’âge et au genre : les jeux de filles tendent à nourrir des dispositions langagières fondées sur le care et des pratiques de littératie précoce, tandis que ceux des garçons cultivent davantage un langage agonistique et compétitif.
En analysant les manières de parler en famille, la thèse met ainsi en lumière les mécanismes complexe de la sociogenèse de dispositions langagières inégalement reconnues et valorisées dans l’enceinte scolaire. Le chapitre 6 montre ainsi que parler pour parler s’avère scolairement rentable, que les enfants qui parlent pour faire savent solliciter les enseignantes mais sont perçus comme peu autonomes, tandis que les manières de parler de ceux qui parlent pour mettre en ordre sont a minima décalées, quand elles ne sont pas jugées illégitimes par l’institution scolaire.
Mots clés : Socialisation, Langage, Enfance, Ethnographie, Méthodes quantitatives, Famille
Composition du jury
Pierre MERCKLE · Professeur des universités, Université Grenoble Alpes
Julie PAGIS · Chargée de recherche HDR, CNRS - Délégation Paris Centre - EHESS
Muriel DARMON · Directrice de recherche, CNRS - Délégation Paris centre - EHESS
Ghislain LEROY · Professeur des universités, Université Sorbonne Paris 13
Stéphane BONNERY · Professeur des universités, Université Paris 8 Vincennes-SaintDenis
Julien BERTRAND · Maître de conférences, Université Grenoble Alpes
Annette LAREAU · Professeur, Université de Pennsylvanie
Thèse dirigée par Pierre MERCKLE et Julie PAGIS.
Date
14h
Localisation
Paris
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